Après un très long silence sur le blog, finalement je retrouve le temps et surtout, l’inspiration à reprendre ma plume : c’est qu’il y en a des épisodes à vous raconter !!! Petit retour en arrière pour vous relater nos dernières aventures en Suisse et nos retrouvailles avec Vagabond après sept mois d'absence...
28 juillet 2020, cela fait maintenant deux semaines que nous sommes de retour en Polynésie. Vagabond est posé à sec sur un petit chantier naval à Taravao, situé sur l’isthme reliant la grande île de Tahiti Nui à la petite presqu’île de Tahiti Iti. Un vent violent le fait trembler sur ses supports, quel sale temps ! La pluie crépite sur le pont. Le ciel est sombre, l’air est frais et nous avons même ressorti nos couvertures, je n’ose pas vous avouer que « froid » signifie 18 degrés la nuit, on s’est très rapidement tropicalisé. Confinée à l’intérieur dans ma couchette, je profite de cette journée tempétueuse pour commencer à écrire…
Confinement en Suisse et incertitudes…
Au mois de novembre 2019, nous étions de retour en Suisse pour remplir la caisse de bord. Le 9 avril, Tom devait revenir en Polynésie pour que le bateau soit prêt à mon arrivée un mois plus tard. Cependant, nos vols seront annulés et repoussés au total cinq fois.
INCERTITUDE, c’est le mot qui définit le mieux comment nous vivons cette pandémie. Vivre au jour le jour, être patient, positif, garder le moral et aussi l’espoir de pouvoir rentrer dans notre petite maison flottante. Vagabond nous manque. Le monde prend des allures de film apocalyptique…
En Suisse, nous n’avons pas de « chez nous ». Tom habite chez sa mère et moi dans une chambre au bâtiment du personnel de l’hôpital où je travaille. Quand on vit sur notre voilier, on a l’habitude d’être confiné 24h sur 24, l’un sur l’autre, dans un tout petit espace pas plus grand qu’un bus Volkswagen. On se marche dessus, alors mieux vaut être un couple fusionnel ! Durant notre séjour en Suisse, ce n’est pas le confinement qui sera difficile mais la séparation car sept mois sans vivre ensemble, cela commence à faire long ! Un jour, on s’offre le luxe d’une chambre d’hôtel, simplement pour pouvoir dormir dans le même lit, c’est ce qui nous manque le plus ! Je ressens le besoin d’avoir à nouveau un « chez nous » et je perds patience. Parfois, je vais jusqu’à la réflexion de me demander s’il ne va pas falloir se réinstaller en Suisse pour un moment, le temps que cette histoire de virus soit terminée… Mais, allez, soyons optimiste, tout finira par s’arranger…
Cette période est très difficile pour beaucoup de gens. Notre situation n’est pas à plaindre et on est heureux d’être en Suisse, proche de nos amis et de nos familles. En plus, on a la chance d’avoir un emploi ! Tom travaille dans une usine high-tech qui fabrique des pièces pour les ordinateurs, autant dire qu’avec l’augmentation du télétravail pendant le confinement, il ne chôme pas ! Et moi, je travaille en psycho-gériatrie dans un hôpital avec une population fragile de plus de 65 ans. Chaque jour, c’est la peur au ventre que je franchis la porte de l’unité, le tableau est sombre et on prévoit le pire… Heureusement, il n’y aura pas de cas de covid sein de l’hôpital. Fin avril, mon contrat à durée déterminée de cinq mois arrive à échéance, nos vols de retour en Polynésie sont annulés. Il faut retrouver un job et un logement. Je contacte des agences de placement et on me propose un emploi en psycho-gériatrie dans un autre hôpital. Difficile de trouver un logement, les gens applaudissent les infirmières de leurs fenêtres mais ils en ont peur et ils refusent de les héberger… Heureusement, mon amie Nathalie me propose une chambre chez elle. Puis, je finis par trouver un petit studio au bord de l’eau. Quel bonheur ! On a enfin un « chez nous » où on peut se retrouver le week-end. Je me rends au travail en vélo en admirant les cygnes et les castors le long du canal. Bref, j’ai une qualité de vie et j’en ai besoin car j’enchaîne les journées de douze heures de boulot dans des conditions difficiles…
En Polynésie, le covid19 n’a fait que 60 cas, très peu d’hospitalisations et aucun décès. Les frontières sont fermées depuis le mois de mars. Des milliers de résidents polynésiens sont restés bloqués en métropole et dans le monde et seront petit à petit rapatriés chez eux pendant le mois de juin. Nous ne sommes ni résidents, ni touristes et nous faisons partie de la catégorie des « inclassables ». Grâce à un groupe Facebook, nous rencontrons d’autres personnes dans la même situation que nous. Reva et Brando quittent la Suisse avec leur petit garçon pour s’installer définitivement en Polynésie, pays d’origine de Reva. Nous serons sur le même vol et nous nous retrouverons à Taravao pour passer pleins de chouettes moments ensemble.
Retrouvailles tant espérées avec Vagabond
Nos billets d’avion sont confirmés pour le 14 juillet : nous sommes sur le premier vol international à l’ouverture des frontières polynésiennes. La Polynésie dépend économiquement du tourisme. Nous devons effectuer un test covid 72 heures avant le départ et un autotest 4 jours après notre arrivée.
L’avion décolle et c’est un immense soulagement ! Après 7 mois en Suisse, nous allons enfin pouvoir retrouver notre « chez nous » et notre mode de vie sur l’eau. Il est 5h30 du matin, l’avion atterri brutalement sur la piste. Il fait encore nuit, la porte s’ouvre et la vague de chaleur moite nous saisit. Une foule de journalistes filme l’arrivée des 270 touristes masqués. La Polynésie tremble au retour des étrangers et du virus qui reviendra très vite lui aussi…
Qui aurait cru qu’un jour, les magnifiques sourires des polynésiens seraient cachés derrière un morceau de tissu fleuri ? Qui aurait cru qu’un jour, j’allais me promener avec un masque dans ces îles paradisiaques du bout du monde ?
A notre arrivée, nous passons une journée et une nuit de repos en chambre d’hôte proche de l’aéroport. L’accueil est très chaleureux, nous sommes garnis de colliers de fleurs et nous dégustons des fruits succulents…
Le lendemain, nous louons une voiture pour nous rendre sur le chantier à Taravao à environ une heure de route. Pendant cinq jours, nous logeons dans un petit studio Airbnb chez Valéa et Franco, une magnifique rencontre ! Ils nous garnissent de fruits, on fait une cure d’avocats, bananes, mangues et oranges. Pendant deux mois, nos amis nous prêtent un vélo pour pouvoir nous déplacer faire nos courses chez Carrefour à un peu moins de 2km du chantier. Valéa s’offre gracieusement de faire notre lessive chaque semaine.
Le paradis polynésien, ce n’est pas les paysages sublimes, c’est les gens ! Un peuple tellement souriant, drôle, débordant d’une incroyable gentillesse et d’une générosité comme nulle part ailleurs. Tiarés, hibiscus, frangipaniers, bougainvilliers, oiseaux du paradis et tant d’autres dont je ne connais le nom, les fleurs et leur parfum délicieux sont partout. Dans la nature, les rues ou les jardins mais aussi sur la tête des femmes qui les portent soit en couronnes, soit piquées dans les cheveux. Elles décorent aussi les salles de bain rudimentaires du chantier parce que la femme de ménage aime partager sa joie et sa bonne humeur.
On bosse comme des fous !
Nous retrouvons notre Vagabond. L’intérieur, très bien isolé, est dans un bon état, aucune mauvaise surprise : pas de moisissures ni de bestioles, ouf ! C’est un immense bordel, nous démarrons par un grand rangement afin de pouvoir vivre à bord. Le pont a souffert, couleur entre le vert et le noir, il est très très très sale. Il nous faudra des heures de nettoyage avant de pouvoir débuter les travaux pour le refaire complètement. Depuis l’achat du bateau en 2014, nous n’avons jamais traité la rouille en profondeur. Alors, cette fois-ci, il est temps de se mettre au boulot !
A Taravao, les locaux disent qu’il y a la saison des pluies et la saison où il pleut… En effet, la pluie tombe chaque jour ou presque, ce qui retarde considérablement nos travaux de peinture. Patience, nous avons suffisamment d’autres projets pour occuper les journées pluvieuses.
- Installer une table amovible dans le carré et dans le cockpit pour pouvoir manger comme des gens civilisés.
- Construire deux petits tabourets pliables en bois contreplaqué à l’intérieur afin de prendre nos repas de manière plus confortable lorsqu’il fait mauvais temps dehors. En fait, notre carré dispose d’une table que l’on peut monter mais nous utilisons l’espace sous la table comme stockage et la couchette du carré est devenue notre espace « lounch ».
- Construire un placard en bois contreplaqué qui remplacera notre vieux frigo plus fonctionnel. On gagne ainsi beaucoup d’espace de rangement supplémentaire et point positif : cela ajoute du poids côté bâbord, le bateau est enfin bien équilibré.
Pour la petite histoire : Toujours pas de frigo à bord mais, on a acheté une petite glacière à compresseur de 17 litres qu’on a fait envoyer par la poste (pour un prix exorbitant !) sauf que la douane nous a réclamé la somme astronomique de 400 euros pour la récupérer ! Donc, on l’a refusé et renvoyé gratuitement à l’expéditeur… En fait, on s’est bêtement fait avoir en montrant la facture de la glacière (qui vaut un peu plus de 300 euros).
- Construire un portique arrière en inox pour accueillir un panneau solaire de 100 watt au lieu de celui de 50 watt afin d’augmenter notre énergie solaire et changer les batteries par des nouvelles plus puissantes. Tout cela pour pouvoir alimenter notre future glacière tant espérée…
- Démonter notre éolienne trop bruyante et déjà foutue après deux ans de presque inutilité. Je déteste le bruit de ces engins ! Du coup, elle a surtout servi de perchoir à oiseaux qui recouvrait notre cockpit de leur déjections…
- Installer un nouveau robinet à eau douce avec une pompe à main intégrée, l’ancien s’était cassé juste avant la traversée du Pacifique et avait été remplacé provisoirement par une pompe à huile bricolée (mais qui a quand même tenue le coup !). Et voilà que notre joli nouveau robinet cassera déjà deux mois plus tard, parce qu’une pièce en plastique de mauvaise qualité s’est brisée en deux.
- Changer la pompe à pied d’eau de mer qui menaçait de casser.
- Changer le waterlock et le pot d’échappement du moteur.
- Réparer la pompe à eau du moteur.
-Refaire le support des boîtes dorades en teck car les anciennes en acier étaient complètement rouillées !
- Et le pire des boulots, le plus redoutable : déboucher la tuyauterie de nos WC... Une journée de m…., au sens propre ! Beurk !
Bref, je vous épargne le reste de la liste qui est encore très longue… Et puis, il y a aussi tous les petits boulots qui prennent beaucoup plus de temps que prévu et à savoir que sur un bateau, tout le matériel ne dure jamais longtemps !
Pendant que Tom effectue des travaux techniques, je m’occupe des vernis intérieurs ainsi que des retouches de peinture. J’achète des jolis tissus et une gentille dame au marché artisanal de Taravao me confectionne des couvertures pour mes coussins, des nouveaux rideaux et des draps de lit… L’intérieur de Vagabond tout en fleurs et coloré n’a jamais été aussi beau !
« Une petite impatience ruine un grand projet » (Confucius)
Après un mois et demi de chantier, Vagabond est enfin mis à l’eau. Au même moment, la déchèterie située juste à côté du chantier est en feu, les images du gigantesque incendie sont impressionnantes ! Un hélicoptère fait des allez retour pour déverser des litres d’eau qui ne seront pas suffisant. Pour une fois, on espère que la pluie va tomber mais il fait sec. C’est le moment d’aller à l’eau !
Malheureusement, l’instant de bonheur d’avoir la sensation de flotter est très bref ! Vagabond prend l’eau par le vieux sondeur qui n’est plus étanche, la toute dernière pièce qui était encore âgée sur notre bateau et qu’on voulait remplacer. On avait même acheté un nouveau sondeur sauf qu’on en avait marre du chantier, on était pressé d’aller à l’eau et on avait remis ce boulot à la saison prochaine. Quelques heures plus tard, Vagabond est ressorti de l’eau et notre moral en prend un coup. Nous retrouvons notre vie sur le chantier pour une quinzaine de jours afin de tout finir dans les règles de l’art. Aucun détail ne sera épargné ! Pour nous consoler, on gagne des échelons de mât (d’une valeur d’environ 700 euros) que l’on récupère gratuitement sur un vieux gréement abandonné, Tom est tout content, il va pouvoir monter dans le mât tout seul ! Moi j’ai trop le vertige pour l’aider ou pour m’aventurer là-haut…
Le 16 septembre, Vagabond est au mouillage dans la baie Phaeton et quelques jours plus tard, toute la longue liste des travaux est terminée. Enfin, un bateau n’est jamais fini, il reste encore des travaux pour la prochaine liste 2021 : Exemple : quelques hublots qui ne sont plus 100 % étanche à changer, génial on se réjouit déjà ! ! Bon allez, le bateau est prêt à naviguer sauf que nous aurons encore des épreuves à relever avant de pouvoir profiter d’une belle vie sur l’eau...
Quand la santé nous crée des soucis…
Le chapitre santé nous aura coûté quelques sous et des moments de stress au court des deux premiers mois en Polynésie.
A peine trois jours après notre arrivée, Tom souffre d’un terrible mal de dent. Il se rend en urgence chez le dentiste qui lui fait un plombage. Quelques jours plus tard, il se retrouve avec une mâchoire très enflée. Défiguré, il ressemble à un hamster asymétrique ! Une infirmière a tendance à imaginer toujours le pire et surtout, j’ai compris une chose : il ne faut jamais faire des recherches sur Google car les symptômes font tout de suite penser à un cancer ou à je ne sais quelle horrible maladie. Tom se rend aux urgences à l’hôpital de Taravao. Il souffre d’une parotidite aigüe : deux semaines de traitement antibiotiques et anti-inflammatoires. Deux mois plus tard, le plombage se brise en deux, les douleurs sont intenses et la dent est finalement arrachée !
A mon tour, et là, c’est vraiment la malchance, je suis victime d’une erreur médicale! Le 8 septembre, je me rends chez une gynécologue à Papeete pour mettre en place un implant contraceptif. Il doit être inséré en sous-cutané dans l’avant-bras, sauf que la gynécologue incompétente l’implante trop profondément, carrément dans le muscle, très proche du nerf ulnaire et de l’artère brachiale. Pendant une quinzaine de jours, je souffre de plus en plus, comme si j’avais un poignard planté dans le bras ! Il existe un risque que l’implant migre dans l’artère brachiale et qu’il se retrouve dans les poumons… Je suis opérée en urgence à la Clinique Cardella et hospitalisée pour une nuit. A savoir qu’ici à l’hôpital, le patient doit emmener son coussin et ses linges de bain, je n’y ai pas pensé donc je vais m’en passer. Pendant l’opération, le nerf ulnaire est touché, ce qui engendre des douleurs au niveau du coude et du poignet, une perte de la sensibilité et des fourmillements dans la main, l’annuaire et l’auriculaire. Les séquelles désagréables vont encore durer plusieurs mois… Nous sommes heureux et soulagés d’avoir conclu une assurance maladie (allemande, spéciale pour navigateurs) juste avant notre retour en Polynésie car jusqu’à présent, nous n’avions qu’une assurance accident et un budget risque pour ce qui concerne les maladies. L’opération a vidé nos cartes de crédit, elle a coûté un peu plus de 2000 euros ! C’est le stress, beaucoup de temps et d’énergie jusqu’à ce qu’enfin notre assurance accepte de nous rembourser les frais de l’hospitalisation, ouf !
Pendant que je suis hospitalisée, Tom se retrouve avec le dos complètement bloqué. Il souffre d’un lombago aigu et il ne pourra presque plus bouger pendant une dizaine de jours. On se retrouve tous les deux confinés à bord de notre bateau au mouillage dans la baie de Phaeton. L’intérieur de Vagabond est petit pour deux personnes, on se marche dessus. L’ambiance devient tendue. Alors, on décide de s’offrir trois nuits dans un joli bungalow. On ne va rien faire d’autre que se reposer dans un cadre idyllique, profiter du wifi et se détendre dans la piscine que l’on a pour nous tout seul. Trois jours qui nous ont fait beaucoup de bien ! Il faut dire que pendant deux mois, on a fait que de bosser comme des dingues 7 jours sur 7 en négligeant de prendre du temps pour nous et pour voir autre chose que le chantier… Le corps a fini par dire stop !
Vacances petit budget en camping
Tom est encore en convalescence, il passe la plupart du temps allongé et il doit continuer les séances chez l’ostéopathe. Le mouillage dans la baie Phaeton est venteux et pluvieux et je commence sérieusement à m’ennuyer dans le bateau. Donc, avant qu’on finisse par se taper sur les nerfs, je décide de prendre une semaine de vacance, histoire de me ressourcer et de me changer les idées loin du bateau et du chantier. Partir seule n’est guère motivant et en plus, je n’ai pas les moyens pour me payer un bungalow au bord de l’eau… Néanmoins, je découvre qu’il y a des « backpackers » en Polynésie, voyager petit budget, c’est possible, en faisant du camping, génial !
Je réserve un vol pour l’île de Huahine. Quarante minutes plus tard, pendant que l’avion atterris, les passagers admirent les baleines qui remontent à la surface juste à côté de la piste qui longe le bord de l’eau ! Magique !
Une semaine de vacances pour vivre l’expérience de dormir devant une superbe plage déserte et sauvage, une vraie vie de robinsonnade, le paradis ! Le camping Hiva Plage situé au sud de Huahine est probablement un des endroits les moins cher de Polynésie, 1300 cfp (un peu plus de dix euros par jour) pour planter ma tente. Je fais de chouettes rencontres avec d’autres voyageurs dont Anne-Sophie, médecin anesthésiste qui a travaillé deux mois à l’hôpital de Nuku Hiva aux Marquises et qui s’offre maintenant quelques semaines de vacances avant son retour en France.
Malheureusement, dès la première baignade, ma cicatrice s’ouvre et s’infecte (cela fait huit jours que j’ai été opérée). Mon bras me fait souffrir et les nuits sont pénibles. Heureusement, Anne-Sophie est là pour m’aider car je n’avais pas forcément pensé à prendre tout le matériel de secours avec moi. Fini la baignade, je regarde mes amis faire du snorkeling en admirant la plage tout en sirotant une bière bien fraîche sur la terrasse de l’hôtel du Mahana, cela pourrait être pire !
Avec un autre couple de voyageurs, nous faisons une mauvaise expérience avec un loueur de voiture parisien. Un type odieux, irrespectueux et insultant, furax parce qu’on lui a ramené le véhicule avec 25 min de retard car on ne retrouvait pas le lieu de location (sa maison dans un coin paumé de l’île). En plus, on l’a appelé pour le prévenir qu’on était perdu. On était tout désolé, c’est vrai qu’on aurait peut-être dû penser à faire un point GPS avec notre portable. Sa femme nous a également accusé de ne pas avoir fait le plein d’essence, alors on lui a redonné les trois euros que coûte un plein, histoire qu’elle se taise. Bref, c’est rare de faire des rencontres aussi désagréable, surtout ici ! Même sur une île dont rien ne semblerait troubler sa quiétude, on peut rencontrer un con et lui, il remporte la médaille d’or ! Cette histoire nous a laissé un goût très amer alors avec Anne-Sophie, nous tendons le pouce au bord de la route. Il faut marcher longtemps avant de croiser une voiture. La route qui borde le lagon nous invite à prendre des photos, les dégradés de bleu sont si beau qu’on s’arrête toutes les deux minutes, on se rendra compte par la suite que les clichés sont quelques peu répétitifs.
Le but de notre journée, ce n’est pas la destination, c’est de faire de belles rencontres. C’est ainsi que nous avons été invitées pour boire un café chez un polynésien dans une villa incroyable au bord du lagon puis rencontré un autre jeune homme fort sympathique qui nous a emmené jusqu’au sentier qui mène à la plage de Hana Iti. Il nous a laissé son numéro en nous proposant de nous reprendre sur le chemin du retour. La piste s’enfonce dans une jungle verdoyante et luxuriante. Trente minutes de marche plus tard, nous arrivons à la paradisiaque plage de Hana Iti. Siki, le gardien des lieux est toujours heureux de recevoir de la visite, surtout des femmes ! Quand il commence à parler, on ne l’arrête plus, c’est un sacré personnage ! Nous grignotons notre misérable baguette de pain accompagnée par la noix de coco que Siki nous offre. Une partie de la plage est privatisée pour un couple qui se paye la carte postale : « un repas de luxe les pieds dans l’eau, au son du ukulélé, sous un paravent décoré de fleurs ». Franchement, cela fait un peu spectacle et ils ont l’air de s’ennuyer. Une fois le repas terminé, le gentil serveur vient nous voir avec les restes présentés dans des plats tressés en feuilles de coco, nos estomacs n’auront jamais été aussi remplis !
Retour à la belle vie sur l’eau dans la baie de Cook à Moorea
Une semaine plus tard, je suis de retour à Tahiti. Nous levons l’ancre en direction de l’île de Moorea à une dizaine d’heures de navigation au moteur car il n’y a pas de vent. C’est un bon test pour notre moteur qui nous a souvent créé beaucoup de soucis la saison dernière. Il faut reprendre confiance en lui. Il crève à bas régime et il va encore falloir régler ce petit problème. Sur le trajet, les baleines sont au rendez-vous. On aperçoit leur souffle au loin et certaines passent très proche du bateau.
Nous jetons l’ancre au mouillage de Vaiare à l’est de Moorea, pas loin des bungalows sur pilotis de l’hôtel Sofitel. Au crépuscule, nous découvrons la silhouette de Tahiti décoiffée de ses éternels nuages, c’est magnifique !
Puis nous rejoignons la spectaculaire baie de Cook. Le décor rappelle les Marquises avec ses crêtes et ses pics volcaniques majestueux.
Le village de Pao Pao niché au fond de la vallée a gardé son charme et son authenticité. Il y a une dizaine de bateaux au mouillage dont le fond de vase tient bien. L’avantage c’est d’avoir toutes les commodités à proximité : le magasin Super U juste en face, ainsi que les poubelles, l’eau potable, et la station essence. Le désavantage, ce sont les puissantes rafales de vent engendré par l’effet venturi des montagnes, parfois il finit par taper sur les nerfs et il fait bon quitter le bateau et d’aller à terre.
Nous sommes mi-octobre, il semblerait que la saison des pluies arrive en avance. Les habitants sont contents car les jardins en avaient bien besoin. Les journées grises pluvieuses et venteuse, on fait du stop et cela fonctionne quand même, malgré la peur du covid, les gens nous prennent. Nous portons un masque. Nous rejoignons le village de Maharepa pour profiter du wifi dans le restaurant Caraméline. Les journées ensoleillées, nous faisons de jolies randonnées dans les champs d’ananas.
Nous retrouvons un couple français connu à Taravao. Francis et Michelle ont décidés de prendre leur retraite en Polynésie et ils font du gardiennage de maison. C’est un principe qui existe partout en Polynésie, lorsque des propriétaires partent en vacances, ils recherchent des gens pour garder leur maison, surtout s’ils ont un chien et aussi pour s’occuper du jardin. Faire du gardiennage est un moyen pour vivre et voyager pas cher en Polynésie puisqu’on ne paye pas de loyer mais par contre, en échange il faut entretenir les lieux (ici on débroussaille beaucoup) et aimer les animaux. La maison est perchée en haut d’une montagne dont la route défoncée est pendue à la verticale, l’accès nécessiterait carrément un funiculaire ! Impressionnante montée et descente, mieux vaut avoir un bon 4x4 et que les freins ne lâchent pas. La vue de la terrasse sur le lagon est époustouflante ! Nos amis vont vivre dans cette maison pendant cinq ans, parfois ils profitent de faire des vacances en gardant d’autres maisons sur d’autres îles pour de plus courtes durées. En tout cas, cette idée de gardiennage de maison nous trotte dans la tête et cela pourrait être un futur projet de retraite pour le jour où nous n’aurions peut-être plus l’envie de vagabonder sur les océans.
Francis et Michelle nous invite pour un repas dont on se souviendra encore longtemps et ils nous emmènent en voiture à la découverte de l’île. La journée se termine avec un cocktail « happy hour » dans le restaurant d’un hôtel de luxe. Merci les amis pour votre générosité et cette journée magnifique !
Un rêve se réalise : nager avec les baleines !
Notre budget activités a toujours été très modeste mais aujourd’hui, nous nous offrons une excursion pour aller voir les baleines et avoir peut-être la chance de pouvoir se mettre à l’eau avec elles, c’est un rêve ! Après l’histoire de la touriste qui s’est fait attaquer par un requin l’année dernière, on a moins envie de s’aventurer seul hors du lagon sans l’assurance d’un guide.
Les eaux chaudes polynésiennes sont un lieu propice de mise bas et de reproduction pour les baleines à bosses. Elles arrivent en juillet-août pour repartir fin octobre en direction de l’Antarctique où elles vont pouvoir se nourrir et constituer une importante couche de graisse. Car, ce qui est très impressionnant, c’est que ces grandes migratrices parcourent des milliers de kilomètres, mettent bas et allaitent l’estomac vide ! Les eaux polynésiennes sont trop pauvres en nourriture. C’est fou ! Quand on imagine la distance qu’elles parcourent, l’énergie pour mettre bas et allaiter le petit, et tout cela à jeun ! Elles perdent alors jusqu’à un tiers de leur poids…
Nous sommes un groupe de huit personnes avec un guide et un capitaine. On aperçoit un autre bateau d’excursion et on le rejoint. Parfois, il peut y avoir plusieurs bateaux et pas mal de monde dans l’eau en même temps, nous avons la chance de n’être que deux bateaux, il faut dire que c’est la fin de la saison et nous avons choisi le tour de l’après-midi… Une mère et son petit sont là devant nous, le bateau s’arrête à une centaine de mètre (c’est la règle) et il faudra nager. Le guide est devant et il aide un gars qui a des difficultés à suivre le groupe en le tirant grâce à une planche. Il y a du vent et de la houle, nager en plein océan n’est pas donné à tout le monde et la plupart des touristes ne savent même pas utiliser les palmes qui leur sont prêtées. La mère et son petit sont déjà partis. Nous retournons jusqu’au au bateau et nous nous dirigeons plus loin pour retrouver les baleines. A la quatrième mise à l’eau dans une mer agitée, franchement je n’y crois plus quand enfin la baleine accompagnée de son baleineau remontent des profondeurs juste en dessous de nous ! Waouh ! Surprenant ! Nous aurons la chance de les voir pendant quelques secondes inoubliables. Heureusement que nous n’avons pas vu de requin car je n’ose même pas imaginer comment le guide aurait pu gérer la panique au sein du groupe.
Cap sur Huahine
Notre idée initiale était de rejoindre les atolls des Tuamotus, sauf que les conditions météos ne sont pas en notre faveur. Notre petit voilier n’étant pas un grand champion au près (vent de face), nous n’avons pas envie de nous battre contre les éléments pendant trois jours… Donc, changement de programme, eh oui, en bateau il faut toujours avoir un plan B et même un plan C… Nous quittons Moorea pour une navigation d’environ 90 milles nautiques (167km) jusqu’à l’île de Huahine. Ma petite semaine de camping m’a donné un premier avant-goût avec une forte envie d’y revenir pour en profiter plus longuement avec notre voilier.
C’est une belle navigation par un vent de travers de 15 à 20 nœuds et une houle de 1,5 mètres maximum. Le génois est déployé avec la grande voile à un ris. Le régulateur d’allure Ariès peine un peu, il faut dire aussi qu’il a encore besoin d’une révision plus intensive car il a mal supporté les sept mois de stockage. Nous enclenchons l’autopilote simrad à piston qui gère très bien car il n’y a pas trop de houle ni de vent et le bateau est bien équilibré. Génial ! Pas besoin de faire des réglages, l’autopilote tient le cap !
C’est moi qui ne gère pas très bien la navigation car je souffre du mal de mer. Après une année sans naviguer, c’est normal. Ce n’est pas vraiment une partie de plaisir. Même le ciel incroyablement étoilé et le fait de compter les étoiles filantes n’y fera rien. La nausée ne passera pas. J’ai tenté le truc d’occuper mon estomac en grignotant sans cesse, ça n’a pas fonctionné. J’avais aussi mis un sparadrap sur le nombril, une boule kies dans une oreille, les lunettes ridicules, le gingembre, mais ça ne sert à rien et comme le patch de scopoderm ne suffit pas, je complète encore avec un comprimé de stugéron (pas sûr que ce soit une bonne idée de combiner les deux). Bon allez, soyons positive, comparé à mes premières expériences, je ne vomis plus mes tripes, je n’ai plus envie de mourir et je ne harcèle plus Tom pour appeler les secours, avec le temps, le mal de mer est devenu un peu plus gérable. Ce n’est pas lui qui m’arrêtera dans ce rêve de tour du monde en voilier ! La récompense de la vie au mouillage me motive à poursuivre l’aventure…
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